L’ancien aide de camp du général Leclerc, Guy de Valence de Minardière, nous a quittés le 7 décembre 2014, à l’âge de 94 ans. L’annonce de sa disparition ne nous est parvenue que plusieurs semaines plus tard. A cette discrétion qui le caractérisait s’ajoutait une autre qualité, apanage des grands hommes, qui est la modestie. Guy de Valence ne se montrait guère dans les cérémonies et autres rendez-vous commémoratifs et pourtant son parcours, tout comme sa personnalité, étaient hors du commun.
Né le 22 février 1920, il est encore étudiant au lycée Louis-le-Grand à Paris lorsqu’éclate la Seconde Guerre mondiale en septembre 1939. La France traverse l’une des pires périodes de son Histoire. Pour Guy de Valence, le temps de l’engagement commence. Son parcours passe d’abord par Saumur (dont il était sans doute l’un des derniers de la célèbre promotion des Cadets de 1940), Fait prisonnier le 22 juin, il s’évade une semaine plus tard. On le retrouve comme aspirant fin 1940 au 5ème Régiment de Dragons à Macon. Découragé par l’ambiance morale qui règne en métropole, il demande sa mutation pour l’Afrique qu’il rejoint en août 1941. Chef de poste à Djipologo (en pleine brousse) en Haute-Volta puis muté à Dakar au 7ème régiment de Tirailleurs sénégalais, il fait la rencontre en septembre 1942 du lieutenant-colonel de Langlade qui va fortement influencer la suite de sa carrière militaire. Sur ses conseils, il intègre le 12ème Groupe Autonome de Chasseurs d’Afrique transformé en février 1943 en 12ème Régiment de Chasseurs d’Afrique. Cette unité devient l’un des trois régiments de chars de la 2ème Division Blindée créée en août 1943 au Maroc par le général Leclerc. Transportée en Grande-Bretagne en avril 1944 pour y poursuivre des entrainements, la 2ème D.B. débarque à Utah Beach en Normandie à partir du 1er août 1944. La campagne de France commence, Guy de Valence est officier de liaison du groupement tactique Langlade. Après les premiers combats et des pertes importantes dans la Sarthe les 10 et 11 août, la 2ème D.B. libère Alençon au matin du 12 août. Guy de Valence est présent aux côtés du général Leclerc sur le Pont Neuf et devant la maison qui lui sert de P.C. Des Alençonnais à peine réveillés de la longue nuit de l’Occupation les entourent, ces moments historiques ont été immortalisés par plusieurs photos très connues.
La progression continue au Nord d’Alençon et le lendemain, Guy de Valence est grièvement blessé (le bras droit arraché) par un tir de char près de Chahains. Son destin bascule une fois encore : transféré en Angleterre, il y est opéré trois fois puis il rejoint Paris début 1945 où il demande à servir encore. Il est affecté à l’état-major de la 2ème D.B. et devient, sur proposition de Leclerc, son aide de camp en second. C’est à ce poste qu’il termine la guerre dans le nid d’aigle d’Hitler à Berchtesgaden, début mai 1945.
Lorsque Leclerc quitte le commandement de la 2ème D.B., il reste avec lui pendant plus de deux ans en Indochine et en Afrique du Nord.
Après la mort de Leclerc, il rejoint la France d’Outre-Mer comme administrateur colonial jusqu’en 1962, puis diplomate. Il a fini sa carrière au début des années 80 comme ministre plénipotentiaire et conseiller technique au cabinet du secrétaire d’Etat chargé des anciens combattants.
Homme brillant et charismatique doté d’une mémoire exceptionnelle, Guy de Valence se souvenait parfaitement de la Libération de notre région et particulièrement de la journée du 12 août 1944 à Alençon. Il avait pu l’exposer devant les élèves et le public lors d’une rencontre inoubliable le 19 juin 2012. L’épisode de Chahains était resté douloureux et il n’avait jamais perdu espoir de retrouver la trace de la plaque accrochée à son bras. Nous avions même entamé des recherches sur le terrain.
Il m’a rarement été donné de rencontrer un homme qui connaissait aussi bien le général Leclerc. La qualité de nos échanges lors de nos nombreuses rencontres à Paris m’ont permis de mieux cerner la personnalité du patron de la 2ème D.B.
Guy de Valence était un homme rare, d’une très grande culture et d’un profond humanisme. Il y avait également chez lui cette petite flamme et cet esprit de liberté qui caractérise les volontaires de la France Libre, de la Résistance ou de la 2ème D.B., qualifiés parfois de « rebelles ». Je mesurais parfaitement en l’écoutant pourquoi le général Leclerc en avait fait son aide de camp.
« A l’heure où j’écris ces quelques lignes, le 22 février 2015, Guy de Valence aurait eu 95 ans. Un clin d’œil de l’Histoire qui nous confirme une fois de plus que les personnes que nous admirons continuent à vivre dans nos mémoires. C’est ainsi que nous leur rendons le plus bel hommage car ils ne disparaîtront jamais. Merci Guy de Valence de tout ce que vous avez apporté à la France. Soyez sûr que nous continuerons à porter les valeurs que vous avez si bien défendu. »
Christophe BAYARD
Professeur d’Histoire
Président de Vive la Résistance
Vice-Président de la Fondation de la France Libre
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